La conspiration du Caire est un film suédois ayant remporté le prix du scénario du Festival de Cannes et le prix François-Chalais, et qui est projeté dans les cinémas français depuis le 26 octobre 2022.
Décrit comme un thriller d’espionnage du réalisateur Suédois d’origine égyptienne, Tarik Saleh, le film de près de 2 heures tourné en Turquie dans la Mosquée Süleymaniye, dresse le tableau d’un pouvoir politique égyptien voulant s’immiscer dans l’élection de la plus haute autorité de l'Islam sunnite en Égypte et dans le monde musulman, en la personne du Grand Imam de la prestigieuse Université d’al-Azhar.
Le film, qui emprunte un sujet déjà développé par Umberto Eco dans le Nom de la Rose, relate l’histoire d’Adam, un jeune pêcheur admis à l'université al-Azhar au Caire au milieu d’une terrible guerre de succession aux enjeux politiques déterminants, suite au décès du Grand Imam.
Le scénario du film, lent et pas toujours crédible avec son lot de trahisons, d’assassinat, de rebondissements et d’intrigues qui inonde le cinéma d’action contemporain, s’évertue à dévoiler les actions menées par un pouvoir politique et sécuritaire pour infiltrer et encadrer la haute autorité religieuse, dans le but barrer la route à l’élection d'un Imam proche des Frères Musulmans.
On va alors demander à Adam, à qui on promet une compensation financière, de collaborer avec le pouvoir égyptien afin d’infiltrer et espionner la mouvance des Frères Musulmans au sein d’al-Azhar.
Une fois le Grand Imam voulu par le gouvernement élu et après une multitude d’intrigues, les services de sécurité « lâchent » Adam, le jettent en prison après une condamnation à mort. Il sera relâché après un ultime service rendu…
Les belles images de tournage et les quelques plans magnifiques de ce film qui parle de foi et de tolérance tout en dénonçant l'intégrisme et son pendant le terrorisme, sont toutefois imprégnés par une vision mi-conspirationniste, mi-critique envers les autorités.
En effet, dans la Conspiration du Caire, Tarik Saleh, fils d’un déserteur de l’armée égyptienne opposé à Nasser, a tenu à mettre ostensiblement entre les mains d’Adam un livre interdit en Egypte.
Soulignons que cet ouvrage a été écrit par l’ancien chef de la propagande des Frères Musulmans et père spirituel de l’islamisme violent, Sayyid Qutb, qui avait exigé de mener des révolutions et de chasser les dirigeants arabes qui n’imposaient pas la Charia, ou loi islamique.
Était-il cohérent dans cette œuvre de pointer du doigt le gouvernement égyptien, sachant que la plupart des pouvoirs politiques de ce monde se sont, de tout temps, méfiés de l’ordre religieux ?
Tarik Saleh, quoique interdit de séjour en Egypte, n’est pas sans savoir que le fondamentalisme religieux constitue depuis longtemps un redoutable contrepouvoir, capable de menacer les institutions publiques et mettre en péril la sécurité des populations.
A-t-il voulu, en filigrane, défendre la thèse des frères musulmans ci-haut évoquée et faire passer les radicaux comme des victimes ? Surprenant !
Au final, on sort de cette œuvre de fiction caricaturiste et superficielle totalement partagés, déconcertés même par la scène de fin du film qui se passe en prison, durant laquelle on évoque les circonstances de la mort du Prophète (QSSSL) et les propos tenus autour de sa dépouille par les futurs califes Omar et Abou Bakr… Une véritable énigme !
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