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Lectures du Coran - Première partie



Quelle démarche scientifique propose Mohammed Arkoun ?


Paru initialement en 1982 chez Maisonneuve et Larose avec un volume de 180 pages, "Lectures du Coran" est un ouvrage-clé de la démarche de Mohammed Arkoun (édi.). Il a été réédité en 1991 suite à la demande de plusieurs lecteurs, qui ont trouvé cet ouvrage trop technique et les explications qu'il contient trop éloignées des préoccupations courantes des musulmans.


Au cours des deux dernières décennies, l’auteur n’a cessé de réviser, d’enrichir, de remanier et de recontextualiser ses travaux.


La version définitive est apparue après la mort de l’écrivain en 2016 chez Albin Michel avec un volume de 512 pages. Ce livre mobilise toutes les ressources des sciences humaines et sociales ainsi que les sciences de la langue pour déconstruire le discours classique sur le Coran.

Mohammed Arkoun considérait ce livre comme une matrice toujours fertile de son œuvre, celle-ci se développait de manière structurée, toutes les problématiques liées aux « critique de la raison islamique ». Ce livre s’inscrit dans son processus d’appels répétés à une réforme des sociétés musulmanes contemporaines.


Les intentions de ce livre « Lectures du Coran » sont d’étudier les conditions théoriques de possibilité d’une lecture qui coïnciderait idéalement avec les intentions de signification originelles du Coran au stade de discours et non pas du texte.


L’auteur met à la disposition des lecteurs et des chercheurs des essais d’application des enseignements des sciences de l’homme et de la société. Il appelle donc à une relecture du Coran en employant les outils des sciences humaines comme la sémiotique, la linguistique, l’historiographie, la philologie, l’anthropologie etc. à l’analyse du discours coranique.


Il donne des pistes pour orienter des recherches dans ce cadre et mener des réflexions sur la pensée, c’est pour cette raison d'ailleurs, plusieurs sujets sont présentés d’une manière superficielle ou inachevée afin d’inciter à entreprendre des études plus avancées en suivant les indices que l’auteur signale à chaque fois.


Arkoun présente une lecture profonde des sujets majeurs présents dans le Coran ou dans sa lecture traditionnelle. C’est la conjonction de ces idées scientifiques qui apparaissent dans sa méthode d’analyse et qui ouvre sur une nouvelle connaissance de l’islam à partir d’une différente lecture de son texte fondateur.


Dans un bilan consacré aux études réalisées sur le Livre Saint de l’Islam, pour introduire le fait coranique, Mohammed Arkoun commence par signaler les conduites inacceptables par des acteurs qui associent leurs actes terroristes à des versets coraniques, l’interaction avec les versets s’éloigne de la méditation intérieure explicitement exigée.


L’auteur propose des perspectives des études coraniques pour mesurer la disproportion entre la consommation idéologique et imaginaire du Coran. Il débute par une analyse critique des pratiques intellectuelles et scientifiques des deux grands courants de la recherche dans les sciences du Coran et examine uniquement la table de matière de l’ouvrage « Al-Itqân fî `Ulûm Al-Qur'ân » du savant polygraphe Al-Suyūṭīde et mets en avant ce chef-d'œuvre de la tradition islamique. Arkoun mène son analyse sur l’article « Qur’ân » signé par A. T. Welch dans la deuxième édition de l’Encyclopédie de l’Islam issu de l’orientalisme, pour repérer les questions demeurées impensables et l’étendue de l’impensé dans l’un et l’autre cas.

Pour Arkoun, les deux démarches restent très limitées, considérées comme négligence de la méthode philologique (déshistoricisation). Face à cette insuffisance, il propose d’insérer le phénomène coranique dans la recherche scientifique et revenir sur les trois concepts : « le pensable », « l’impensable » et « l’impensé » afin d’enrichir l’histoire de la pensée et dynamiser toute pensée critique en fixant l’attention sur les problèmes qu’elle a refoulés, les tabous qu’elle a instaurés, les frontières qu’elle a tracées, les horizons de sens qu’elle a cessé ou interdit de regarder, tout cela au nom de ce qu’elle a progressivement imposé comme l’unique vérité concentrée dans le credo orthodoxe.


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