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Lectures du Coran - Troisième partie : Lecture de la Fâtiha et la sourate 18


Dans notre deuxième partie, nous avions présenté la démarche scientifique proposée par l'auteur pour une nouvelle lecture du Coran. Dans cette partie, nous allons présenter des exemples pratiques de cette démarche.


Lecture de la Fâtiha


Pour une étude sur la lecture de la Fâtiha, Arkoun propose trois protocoles qui s’imposent dans ce processus : (liturgique, exégétique et linguistique-critique) mais l’auteur tente suivre le dernier protocole car il vise dans toute la mesure du possible à mettre en relief les valeurs proprement linguistiques. Mais il trouve que les investigations n’ont qu’une valeur heuristique.


L’auteur définit les différents principes et espère qu’ils sont suffisamment mis en clair pour prévenir les malentendus et surtout toute interprétation qui transforme l’effort soit en entreprise apologétique, soit en une tentative d’explication réductrice.


L’auteur dit à ce propos : «le Coran n’a besoin de l’apologie pour imposer sa richesse et il est trop riche pour laisser se développer trop longtemps une prétention scientiste » (p. 123).


L’auteur propose pour cela de parcourir premièrement le moment linguistique en développant les points suivants :


· Le procès d’énonciation

· Les déterminants

· Les pronoms

· Les verbes

· Les noms de la nominalisation

· Les structures syntaxiques

· La prosodie


Ensuite de parcourir le moment historique, pour ce faire, l’auteur a choisi le commentaire de Fakhr al-Dīn al-Rāzī dans l’objectif de mesurer le degré d’adéquation entre le texte tuteur et le texte second qui récapitule une longue et riche tradition, de constituer une topologie de la signification en opposant l’originaire au culturel, le langage mythiqueau langage logocentriste. Il cherche à identifier les différents codes qui commandent la lecture de al-Rāzī et il repère les codes : linguistique, religieux, symbolique, culturelet analogique.


Et pour le moment anthropologique, l’auteur signale que les religions monothéistes sont écartées de cette recherche scientifique et surtout l’Islam. Il se limite à poser quelques questions mais non la matière suffisante pour donner une réponse.


(Re) Lecture de la sourate 18


Dans ce chapitre Arkoun traite son sujet sur trois pistes de travail. Il commence d’abord par le texte, puis l’exégèse classique, et finit par les décisions qu’il faut annoncer en tant qu’historien afin de présenter une nouvelle relecture de la sourate 18. Il s’appuie ensuite sur la définition du mythe évoquée plus haut pour faire son analyseanthropologique comme moyen d’analyse scientifique. Il se base essentiellement sur :

- Le statut sémiotique du discours coranique qui consiste à mettre en chantier le dogme théologique de l’i‘jāz. - La transcendantalisation en tant que pratique culturelle commune à toute la société du Livre. - L’historicité en tant que fonction qui se fait à l’aide de quatre concepts (le temps universel et public, le cours des choses, le récitant, l’état du présent).

Par cette relecture, l’auteur vise à la fois un intérêt théorique en contribuant à une typologie du discours religieux et un intérêt pratique en forgeant, pour la pensée islamique contemporaine, des outils plus efficaces que ceux qu’elle croit devoir chercher encore dans sa tradition classique afin d’ouvrir la voie à une relecture plurielle.


Il commence par distinguer les points forts de l’exégèse classique, puis il essaie de travailler sur la lecture des deux exégètes al-Ṭabarī et al-Rāzī pour connaitre les principes de leur exégèse et les procédés de leur exposition en soulignant les insuffisances.


D’après Arkoun, c’est le travail de l’historien qui reconstitue les processus de production des catégories abstraites construites par le théologien et le philosophe classiques. Avec l’analyse psycho-socio-historique on peut arriver à une mythification, une mythologisation, une idéologisation. Il note ici que les islamologues restent généralement à l’écart de telles curiosités historiques et épistémologiques. Leur activité exégétique est restée donc enfermée à travers les différentes époques, même celle qui est considérée comme la période productive entre le deuxième et le sixième siècle de l’Hégire.


Il présente les trois grands récits mythiques de la sourate 18 : le récit mythique de la caverne, le récit mythique de Gilgamesh, le récit mythique d’Alexandre le Grand. Et il essaye de démontrer comment cette pensée est à l’œuvre, en inscrivant le Coran dans le Proche-Orient ancien. L’analyse de ces passages montre bien comment le discours coranique, comme le discours biblique d’ailleurs, va se saisir d’un certain nombre de gravats de la culture, pour les transformer en fonction de sa propre perspective.


Ce qui est nouveau chez Arkoun dans cette relecture, c’est qu’à la fois il réhabilite et dit que le langage scientifique ordinaire tel qu’on l’entend n’est pas le tout de la réalité, et la pensée mythique permet de dire quelque chose sur la notion de l’altérité, sur le cosmos, et sur la théologie et l’homme. Il essaye aussi de démontrer comment le Coran investi tous les éléments, pour inscrire une nouvelle perspective qui est autour de l’unicité de Dieu dans le texte coranique. Donc ne pas comprendre le langage mythique, la place de la métaphore, la place de la parabole, et la place du merveilleux, c’est ne pas comprendre comment ce discours fonctionne et quelle est son efficacité.


Il conclut par constater que l’exégèse a construit un espace homogène de représentation, de projection, d’expression et d’existence à l’aide d’un discours tuteur et d’un discours social ancien.


Face à cet espace homogène, l’auteur propose des perspectives pour mener des investigations plus avancées, soit par la définition d’un statut sémiotique du discours Coranique qui remet en chantier le dogme théologique de l’i‘jāz, soit par des investigations sur la transcendantalisation. Le but est de contribuer à libérer la connaissance historique du cadre et des procédures du récit pour le faire accéder à la fonction de dévoilement des enjeux réels de l’historicité (p. 169).




A suivre ...




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