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Il a fondé une organisation secrète pour renverser l'État abbasside, ils l'ont crucifié trois fois, démembré et brûlé... Al-Hallaj était-il un hérétique rebelle ou un pionnier du soufisme politique ?


Il y a environ deux ans, alors que je préparais du contenu pour l'une de mes émissions en direct, je suis tombé sur un article approfondi et détaillé sur le site d'Al Jazeera, rédigé par le chercheur Abdel Qudus Al-Hashemi. Cet article explorait en profondeur la vie d'Al-Hallaj ainsi que les différentes perspectives sur sa personne, et les opinions de ses partisans et de ses détracteurs, avec une neutralité scientifique remarquable, présentée de manière fluide et captivante. Al-Hallaj, le soufi, a été une figure très controversée de son vivant et après sa mort. J'ai donc pris l'initiative de traduire et d'adapter le contenu de cet article en français afin de rendre service aux lecteurs non arabophones. Compte tenu de sa longueur, je le partagerai en plusieurs parties afin que chacun puisse en bénéficier. Je souhaite une lecture enrichissante à tous les passionnés et chercheurs de vérité.


Francisation de l’article :


PREMIÈRE PARTIE :


Dans le cadre de son objectif, l'article a adopté plusieurs approches pour dresser un portrait complet de l'homme et de son projet. Il a exposé les divergences d'opinions à son égard, tant en termes d'éloges que de critiques, et a exploré le mystère entourant ses croyances ainsi que les raisons de la confusion du public à son sujet. De plus, il a examiné sa vie politique et les malentendus qui ont surgi quant à la compréhension de ses actions et de ses correspondances. L'article a également analysé en détail les sources de son soufisme, confirmant la tradition sunnite des méthodes d'apprentissage et de formation qu'il a suivies, ainsi que l'intégrité et l'approbation de ses maîtres chez les érudits de la connaissance spirituelle. À tel point qu'un grand imam hanbalite tel qu'Abu al-Wafa ibn 'Aqil (mort en 513 de l'Hégire / 1119 de l'ère commune) s'est porté à sa défense et a même écrit en sa faveur.


“Lorsqu'une personne réunit trois signes en elle, elle est considérée comme un grand homme et a droit à l'immortalité : l'excès d'admiration de ses amoureux et de ses adeptes ; l'excès de la haine de ses envieux et de ceux qui le reniaient ; et un ensemble de secrets et d'énigmes l'entourait comme s'il était parmi les merveilles de la création qui laissent perplexe ceux qui les décrivent... Ils attribuaient parfois cette capacité au miracle divin, parfois à la magie et à la sorcellerie !”.


C'est la trinité de l'immortalité que Abbas Mahmoud Al-Aqqad (mort en 1384 de l'Hégire / 1964 de l'ère commune) a établie dans son livre "Le retour d'Abu al-Ala al-Ma'arri", et que nous retrouvons incarnée dans la personnalité du soufi : Al-Husayn ibn Mansur al-Hallaj le Persan (mort en 309 de l'Hégire / 921 de l'ère commune), que nous avons choisi comme sujet de cet article dans le but de révéler la vérité sur son état, et de fournir au lecteur un modèle de conduite à son égard, de sorte qu'il ne soit pas troublé par les divergences d'opinions des gens ni par leurs différents points de vue sur Abou Mansour.


Quant à l'aspect politique de la vie d'Al-Hallaj, l'article a recueilli à partir de textes et de preuves ce qui soutient l'idée de son activisme politique, expliquant ses voyages à travers les pays pour recruter des disciples dans sa mission secrète et mobiliser le public contre l'État abbasside. Il a également établi un lien avec le réseau d'organisations secrètes à l'époque d'Al-Hallaj, révélant la possibilité de coopération entre lui et ces organisations, notamment parce qu'Al-Hallaj était très actif et discret, et qu'il avait un discours polyvalent lui permettant de s'adresser à différents groupes et courants en se présentant comme quelqu'un qui les réunit tous..


L'une des zones d'ombre de la personnalité d'Al-Hallaj réside dans la nature de ses discours et de ses symboles. L'article s'est efforcé de proposer une nouvelle interprétation en suggérant qu'ils constituaient une "clé" dans sa communication organisationnelle avec les chefs de ses troupes et de ses partisans. Ainsi, il écarte l'interprétation religieuse ésotérique au profit d'une signification indicative procédurale liée à une gestion politique révolutionnaire clandestine. Cette analyse remet certainement en question de nombreux mythes entourant l'assassinat d'Al-Hallaj sur des bases religieuses liées à l'apostasie et à l'hérésie, et met plutôt l'accent sur l'examen de son cas à travers le prisme de ses motivations réalistes, en lien avec les conflits de pouvoir et les ambitions politiques.


Une perception obscure


Les détracteurs d'Al-Hallaj étaient si fervents que certains savants de son époque l'ont déclaré apostat, affirmant : "Al-Hallaj a été exécuté par l'épée de la loi pour hérésie". Ils ont également écrit sur son "hérésie", notamment l'imam Al-Dhahabi (mort en 748 de l'Hégire / 1347 de l'ère commune) - l'auteur de la célèbre phrase - qui déclare au sujet d'Al-Hallaj "J'ai condensé ses erreurs en deux volumes". Avant Al-Dhahabi, Ibn al-Jawzi (mort en 597 de l'Hégire / 1201 de l'ère commune) a écrit "Al-Qati' li-Mihal al-Loujaj al-Qati' bi-Mouhal al-Hallaj" (La décision irrévocable sur les absurdités de la polémique d'Al-Hallaj), puis vint l'orientaliste français Louis Massignon (mort en 1382 de l'Hégire / 1962 de l'ère commune) qui le considéra comme un second Christ après le Prophète Jésus fils de Marie (que la paix soit sur lui).


Les ouvrages biographiques décrivent des événements extraordinaires associés à Al-Hallaj, qui défient l'imagination au point que certains l'ont presque divinisé, et des récits énigmatiques ont été attribués à sa personne, dont la vérité a été dissimulée même à sa propre famille. Son fils, Hamad ibn Al-Hallaj, confie : "Il a appelé les gens à quelque chose dont j'ai du mal à comprendre la vraie nature". Ibn Bakawayh al-Shirazi (mort en 428 de l'Hégire / 1038 de l'ère commune) a également rapporté ces événements, étant peut-être le premier à consacrer une œuvre entière à Al-Hallaj, comprenant sa biographie et ses récits. Al-Dhahabi a décrit Ibn Bakawayh comme "l'imam vertueux, le savant renommé, le chef des soufis".


Al-Hallaj était un mystère parmi les mystères de notre patrimoine et une personnalité très déconcertante pour ceux qui l'étudient. Nous ne trouvons aucun texte qui reflète cette perplexité à son égard comme le fait le texte d'Al-Dhahabi qu'il a inclus dans sa biographie, exposant les trois possibilités de la façon dont les gens le percevaient, tout en penchant lui-même vers l'affirmation de son hérésie. Al-Dhahabi dit : "Réfléchis, ô Abdallah (serviteur de Dieu), à la situation d'Al-Hallaj, qui est parmi les chefs des Qarmates (al-qarāmiṭa) et les propagateurs de l'hérésie, fais preuve de justice et sois pieux.. ; si tu as la certitude que les caractéristiques de cet homme sont celles d'un ennemi de l'islam, un amateur de pouvoir, désireux de se manifester avec le faux et le vrai, alors débarrasse-toi de son affaire; et si tu as la certitude - que Dieu nous en préserve - qu'il était... juste, guidé, éclairé, alors renouvelle ta foi et implore ton Seigneur de te guider vers la vérité... ; et si tu doutes et que tu ne connais pas sa véritable nature et que tu te dégages de ce dont il est accusé, tu auras préservé ton âme, et Dieu ne te demandera même pas de rendre des comptes à ce sujet." Sachant que l'imam Al-Dhahabi, dans notre tradition islamique, est généralement accusé dans ses jugements sur les personnalités controversées du soufisme. Malgré son établissement d'une règle d'or pour traiter de ceux sur lesquels il y a divergence, il n'a pas suivi cette règle en montrant de la compassion pour Al-Hallaj et en demandant pardon pour lui. Il a ignoré ce qu'il a écrit juste avant - à savoir deux lignes avant - où il dit : "Si une faction de la communauté égare une personne, tandis qu'une autre l'éloge et la vénère, et une troisième se retient de la critiquer; il est de ceux dont il convient de s'abstenir de juger, de remettre leur affaire à Dieu, et de demander pardon pour eux dans l'ensemble, car sa foi est certaine et ses égarements sont douteux; ainsi, ton cœur se soulagera de la rancœur envers les croyants".


À suivre…




M.FAROUK.T

©Minbarinfo 2024


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